Aucun(e) motard(e) n’a jamais entendu le nom de Norton à un moment donné dans sa vie. Norton fait partie des marques anglaises les plus mythiques. Comme d’autres constructeurs, la marque a remporté de nombreuses victoires en course durant son existence. Et cela, elle le doit à son modèle phare : la Norton Manx.
La Manx c’est LA machine de course de Norton. Développée spécifiquement pour la compétition à partir de 1932 sous l’appellation « International Racing Model », et essentiellement pour le Tourist Trophy, c’est grâce à elle que Norton a brillé en compétition. Les succès au guidon de cette Manx se sont multipliés durant les années qui ont suivi son développement jusqu’à l’aube de la Seconde Guerre Mondiale. Tu pourras retrouver toute l’histoire complète de la Manx dans cet article, ici même sur le site.

La Norton Manx 500 cm3 de 1936 avec son cadre Garden Gate à simple berceau, une véritable moto de course taillée pour la gagne à son époque.
Elle réapparaît en course à partir de 1946, mais la concurrence a également affûté ses meilleures armes entre-temps pour s’y confronter. La cadre de la Manx de 1946 – affectueusement nommé Garden Gate et traduit littéralement en français par « Porte de jardin » – n’a pas réellement évolué depuis. Celui-ci étant toujours le même que celui qui équipait la Manx d’avant guerre, il fut sujet à un certain nombre de casses en compétition, il devenait donc nécessaire pour Norton de faire évoluer son cadre pour gagner en fiabilité et en efficacité.
Norton, soucieux de la fiabilité de ses motos en compétition et ayant une vue sur les travaux du pilote et ingénieur Richard “Rex” McCandless sur ses propres motos, la marque lui propose alors de développer un nouveau cadre pour la Manx.
L’idée de R. McCandless était simple : renforcer le cadre en dédoublant l’unique berceau du Garden Gate d’origine de la Manx. Pour cela, et afin d’accroître la rigidité du cadre, il utilise du tube Reynolds composé d’un alliage d’acier avec du chrome-molybdène en remplacement du tube utilisé initialement par Norton. L’idée est géniale, les résultats le prouveront.

Les plans extraits du brevet déposé N°26294/49 pour le Featherbed datant du 13 octobre 1949 travaillé par R. McCandless pour Norton.
Cependant un excellent cadre n’est rien si le reste de la partie cycle n’est pas préparée en conséquence. La littérature ne retiendra que le nom de R. McCandless pour le développement du cadre. Les dépôts des brevets publiés indiquent que R. McCandless aurait travaillé uniquement sur le cadre mais la littérature oublie l’amélioration de la fourche avant (par l’ingénieur C.G. Smith) et la nouvelle suspension arrière (par l’ingénieur E.M. Franks) qui ont complété l’évolution de la Manx. Dans tous les cas, ce travaille d’équipe porta ses fruits et les résultats de toutes ces évolutions sur le comportement de la Manx furent extraordinaires et se vérifieront dans les succès en course de Norton.
Et si tu te demandes d’où provient un nom pareil pour un cadre de moto, sache qu’il existe une petite histoire à son sujet. Selon la « légende », le nom Featherbed proviendrait d’un essai d’Harold Daniell, pilote et vainqueur 3 fois du Tourist Trophy sur l’Ile de Man. Suite à son essai, il décrira que le pilotage de la Manx avec ce nouveau cadre s’apparentait au fait « de monter sur un lit de plumes – traduit en anglais : Featherbed » en comparaison de l’ancien cadre Garden Gate. C’est dire le changement radical qu’il y a pu avoir entre le Garden Gate et le Featherbed sur le comportement dynamique de la Manx.
Ce nouveau cadre sera utilisé en compétition à partir de 1950 et permettra à Norton avec sa Manx monocylindre de pouvoir rivaliser avec les constructeurs concurrents et leurs multicylindres pendant de nombreuses années. A partir de 1951, elle passera du statut de moto d’usine à celui d’une compétition-client accessible pour des pilotes privés.
La Norton Manx 500 cm3 de 1952 avec son cadre Featherbed et sa fourche avant téléscopique Roadholder … Un combo gagnant pour la compétition.
Le Featherbed tirera sa révérence en janvier 1963 avec l’arrêt de la production de la Manx par Norton. Cependant, l’histoire ne s’arrête pas là pour le Featherbed …
Comme tu as peut être pu le lire dans l’un des article à propos du Café Racer, Dresda Motorcycles fut parmi le premier à distribuer en grande quantité des Triton à cadre Norton et moteur Triumph, notamment lors de la période « Café Racer ».

Un extrait du catalogue Dresda Motorcycles de 1969 avec les options disponibles sur une Triton dont le cadre Featherbed ainsi que sa version allégée en option “extra”.
Dave Degens – fondateur et patron de Dresda Motorcycles – reprendra les lignes du cadre et en adaptera certaines parties ainsi que d’autres composants de la partie cycle comme notamment le bras oscillant. D’ailleurs à ce sujet, une petite astuce pour reconnaître une partie cycle issue de chez Dresda Motorcycles au premier coup d’œil : le bras oscillant est composé d’armatures de sections rectangulaires ;).
La réussite de ce cadre est telle, qu’aujourdhui encore, il est toujours possible de pouvoir s’en procurer un pour se faire sa propre moto de course. D’autres constructeurs proposent des refabrications à l’identique voire améliorées de celui-ci. Le succès du Featherbed est l’une des preuve qu’une immense réussite, peut parfois, réussir à s’échapper de son cadre initial.
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