L’histoire de la Vincent H.R.D. Black Shadow – Partie 1

Ombre Noire, ou Black Shadow dans la langue de Shakespeare, est selon Philip Vincent, propriétaire de la marque Vincent H.R.D., sa définition de la sportivité et de l’excellence qu’il a donné à sa propre création en matière de moto.

Evolution de la fameuse Rapide de la marque, la Black Shadow est sans aucun doute l’aboutissement d’une exceptionnelle ingénierie développée au fil des années par Philip Vincent et par Phil Irving, concepteur de son extraordinaire moteur en V, avec leurs perspectives très personnelles de ce que devait être une moto. 

La Rapide, surnommée « The Little Big Twin » outre-Manche, était connue de nombreux motards de l’époque de par ses qualités routières et sportives notamment grâce à sa partie cycle innovante et son énorme moteur de 998 cm3. Elle fut plébiscitée surtout pour sa capacité à passer le cap des 180 km/h sans encombre et le tout dans un confort peu commun pour l’époque. Une machine rare de par sa conception originale mais aussi et surtout par rapport à son prix de vente extrêmement élevée s’adressant évidemment aux motards « fortunés » et avides de vitesse. Et c’est sur cette base qu’est née la Black Shadow.

1936, la création de la Rapide

Pour comprendre la création de la Black Shadow, il faut d’abord découvrir la Rapide et sa conception. C’est donc en 1936 que la marque Vincent H.R.D. présente à l’Olympia Show de Londres la « Rapide Model » première du nom. Un modèle étonnant qui n’est pas sans rappeler un autre modèle légendaire de la marque, la 500 monocylindre. Pourquoi ? Car elle reprenait de nombreux principes appliqués à celle-ci avec notamment les caractéristiques du monocylindre de 500 cm3 mais multiplié par 2 pour en faire un énorme bicylindre disposé en V à 50 degrés de 998 cm3, équipée d’une boîte de vitesses séparée et le tout monté dans un cadre berceau suspendu breveté par la marque. La 500 cm3 ayant déjà fortement marqué les esprits de par sa conception originale et ses engagements en compétition, il était certain que la Rapide allait en faire autant si ce n’est plus. 

Pour l’anecdote, des versions préparées de la 500 cm3 furent équipées chacune d’un compresseur et 3 d’entre-elles furent engagées au Tourist Trophy de 1936. Au dernier moment, le staff de l’usine décida de retirer les compresseurs de ses motos mais aucune ne pu prendre le départ car les ingénieurs manquaient de temps pour les remettre au point suite à ce retrait un peu trop précipité.

La Vincent H.R.D. 500 de 1936 engagée au T.T. avec l’esquisse de son moteur équipé d’un compresseur. 

Avant d’être connu pour ses talents de motoristes, la marque Vincent H.R.D. est surtout connu pour ses parties cycles avec ses suspensions arrières bien spécifiques assurant une excellente triangulation peu commune pour l’époque. Ce système de suspension comprend des ressorts doubles disposés sous la selle, elle-même reliée à cette suspension via des ressorts pour la série A d’avant-guerre et des montants articulés pour les séries suivantes. Et contrairement à ce que le visuel pourrait laisser transparaître, la selle n’est pas impactée par le débattement de la suspension arrière. 

Le moteur, quant à lui, dispose donc de 2 cylindres montés en V à 50° avec un rapport alésage x course de 84 x 90 mm, ce qui en fait un moteur longueur course. Celui-ci était équipé d’une distribution surélevée bien particulière dénommée « Semi-O.H.C. » par la marque, un principe de distribution hybride se situant à mi-chemin entre une distribution classique par tiges / culbuteurs et un système desmodromique. Explication : les 2 pignons solidaires des 2 paires de cames ne sont pas attaqués directement par le pignon moteur mais par l’intermédiaire d’un grand pignon ajouré pour réduire son moment d’inertie, ce qui permet d’avoir les 2 arbres à cames disposés un peu plus haut que les bases des cylindres. Les tiges des culbuteurs peuvent donc être plus courtes impliquant donc une meilleure rigidité tout en bénéficiant de plus de légèreté. Là où ce principe se différencie encore des autres systèmes, c’est dans la manière dont les culbuteurs disposés transversalement attaquent les queues de soupapes. Avec le Semi-O.H.C., l’extrémité du culbuteur est en forme de fourchette et attaque le milieu de la tige de soupape en exerçant une pression sur un renflement. Le ressort est alors disposé au-dessus du basculeur sur la partie supérieure de la soupape et il rappelle donc la soupape, le culbuteur ainsi que sa tringle réduisant alors au minimum l’inertie de la distribution. Si on compare une distribution par arbre à cames en tête avec ce principe de distribution, celui-ci à pour avantage de réduire la hauteur des culasses, ce qui permet alors un meilleur refroidissement des points chauds sur les parties les plus hautes.  

La Vincent H.R.D. série A première du nom.

La Rapide série A était proposée dans sa version de base en incluant un éclairage de 36W en 6V, un klaxon électrique, un compteur de vitesse gradué jusqu’à 120 mph, une horloge, une selle passager montée sur ressort, une pompe de gonflage pour les pneus ainsi qu’une trousse à outils. En option, le constructeur proposait une liste d’options relativement importante pour l’époque comprenant, entre-autres, les éléments suivants : un compte-tour de chez SMITH, une horloge de chez SMITH, un sabot de protection pour la partie basse, un porte-bagages suspendu breveté, un porte-bagages à ressorts breveté, des repose-pieds passager, des repose-pieds passager type T.T. avec le repose-pied droit rabattable, un réservoir d’essence de 4 gallons, un réservoir d’essence de 4 gallons tout en acier inoxydable, des garde-boues et haubans type T.T. en Duralumin ainsi qu’une couronne spécifique.

Malheureusement cette première mouture de la Rapide série A eut de sérieux problèmes de boîte de vitesses et d’embrayage, la faute à un moteur trop puissant face à un ensemble embrayage / boîte de vitesses trop fragile pour encaisser le couple de celui-ci. A l’arrivée de la Seconde Guerre Mondiale, la production de la Rapide est mise en stand-by en attendant des jours meilleurs mais Philip Vincent se penche déjà sur son amélioration.    

1946, le retour de la Rapide 

Après la Seconde Guerre Mondiale, la Vincent Rapide, surnommée aussi « The Little Big Rapide », refait surface dans une version revue et corrigée avec une liste de modifications qui tranche complètement avec le modèle d’avant-guerre, ce sera la série B. L’idée est simple : réaliser une moto surpuissante tout en conservant l’encombrement d’une 500. Et pour y arriver, les principes initiaux de la moto anglaise sont transgressés, voire supprimés. Grossièrement, tout ce qui ne dessert pas l’objectif est balancé sans remords à la poubelle, et pour le reste on observe, on adapte et on ré-introduit.     

La Vincent H.R.D. Rapide série B de 1946. 

Du côté du moteur, la cylindrée et le principe de distribution sont conservés mais la grosse modification provient de la boîte de vitesses. L’ancienne boîte séparée disparaît et vient s’intégrée au bloc moteur tandis que la transmission primaire par chaîne lubrifiée en bain d’huile est conservée avec son tendeur automatique WELLER. Cette nouvelle boîte de vitesses est complétée, au passage, par un petit levier indiquant le point mort ainsi que la vitesse enclenchée. La marque fait l’usage d’alliages d’aluminium pour la conception des cylindres, des culasses ainsi que des gardes-boues ce qui réduit son poids à moins de 200 kg, une véritable prouesse pour l’époque. A noter qu’en option, et sur demande spécifique pour l’utilisation d’un side-car, le kick peut être monté à gauche si nécessaire.

L’énorme moteur de la Rapide série B.

Mais là où le motard de l’époque sera le plus surpris, c’est sur la partie cycle. Le tube de cadre qui lie la base du moteur à la partie inférieure de la direction a disparu pour laisser place à une autre forme de cadre. Le cadre se compose ainsi avec : une poutre en acier matricé cachée par le réservoir, une fourche arrière qui se relie à cette même poutre par les ressorts sous tubes de la suspension ainsi qu’un berceau double partant de la base de cette fourche s’arrêtant à l’extrémité arrière du carter moteur et c’est à peu près tout. La liaison entre les tubes inférieurs du cadre et la poutre étant réalisée par le moteur lui-même. La base du carter repose donc sur le berceau double et les culasses sont reliées à la poutre principale par des jumelles en acier qui fixent 4 colonnettes vissées dans le carter moteur en traversant les cylindres dans leurs longueurs. L’ensemble carter et cylindres forme donc une partie intégrante du châssis ce qui lui assure une rigidité hors norme pour l’époque. Ce principe de cadre fut déjà observé par le passé notamment chez le constructeur P.M. Panther mais d’une manière moins évoluée.  Selon Philip Vincent, cette solution apporte plusieurs avantages :

  • l’ensemble bloc moteur / cadre assure un gain de poids ainsi qu’une meilleure rigidité qu’un montage classique de moteur dans un cadre séparé
  • l’élimination du tube avant permet de conserver une valeur d’empattement relativement réduite notamment avec un moteur de 998 cm3 disposé en V 
  • le nouveau cadre permet une meilleure accessibilité au niveau du moteur 

Du côté de la suspension arrière, on retrouve le système de la version d’origine situé sous la selle. Pour la fourche avant, la marque est restée sur un principe de fourche classique type parallélogramme montée sur roulements en bronze anti-friction et auto-lubrifiant. Des rondelles cannelées en bronze évitent le contact entre les fourreaux et les biellettes tout en conservant un jeu latéral minimum et nécessaire au bon fonctionnement.

Au niveau du freinage, la Rapide est équipée à l’avant comme à l’arrière, de 2 tambours actionnés via un palonnier assurant une parfaite synchronisation dans son fonctionnement tout en assurant un réglage rapide et facile. Le tambour avant renferme, quant à lui, la commande de l’indicateur de vitesse. Il faut souligner aussi qu’en complément de la béquille arrière, la Rapide dispose de 2 béquilles latérales qui, employées simultanément, permettent de soulever la roue avant pour pouvoir la démonter.

Au niveau du poste de pilotage, le guidon est un tube de petit diamètre relativement étroit, équipés de leviers ajustables avec notamment une manette d’air distincte pour chaque carburateur. On remarquera également l’absence d’une manette pour régler l’avance de l’allumage, celui-ci se faisant de manière automatique. 

Sur le plan esthétique, la Vincent H.R.D. série B se la joue grande classe avec sa belle robe noire. Une moto d’exception avec un tarif qui crève le plafond pour l’époque et inaccessible au motard lambda. 

La presse essaie la Rapide lors d’un matin froid d’une mi-décembre comme Paris les connaît et l’impression du journaliste confirme ce que les détails techniques évoqués ci-dessus nous indiquent, il raconte :

« Un embrayage d’une douceur inconnue, facilement manœuvrable avec un doigt, une levée sur la pédale du sélecteur, un démarrage en souplesse grâce au couple du bicylindre. Un peu de gaz, 40 au compteur, seconde … 70, troisième 100, quatrième 120. Il est temps de voir si c’est si rapide qu’on le dit ! Je quitte les repose-pieds avant, m’assieds en position arrière sur la selle bi-place, pose la pointe de mes bottes sur les repose-pieds du passager et me couche sur le réservoir. J’ouvre tout, et, dans cette partie de la route qui monte à 5 % environ, le compteur dépasse bientôt 160 ; doublant en trombe quelques 11 légères qui se croyaient les reines de la route, je suis déjà au pont de Rocquencourt. C’est le moment d’essayer les doubles freins ; ayant repris une position normale, je freine doucement sur les deux roues puis plus énergiquement, et tout en rétrogradant mes vitesses, je suis redescendu à 10 à l’heure en première en un temps qui m’a semblé étonnamment court et tout cela sans la désagréable sensation de la roue bloquée ripant sur le sol ou du pneu et de la fourche s’écrasant sous le coup de frein avant. Non, tout se passe en souplesse, sans bruit ni mouvement brutal ; (…) Sur le plat, avant la descente, le compteur frise le 175. Voilà le moment de vous donner mon avis sur la tenue de route : je ne m’emballe pas facilement mais je dois avouer n’avoir jamais eu une telle sensation de sécurité ; aucune réaction, cisaillement ou « roulis », même en franchissant les raccords ciment-pavés au passage des ponts ; nul besoin de cramponner le guidon. Au contraire, les mains sur les colliers des leviers de frein, de débrayage, le petit doigt de la « dextre » empêchant la poignée de se fermer, les coudes serrant le réservoir, la machine semble suivre un rail et pourtant obéit docilement si l’on veut changer de ligne pour doubler ou se rabattre. »

Le journaliste lancé à 170 km/h sur autoroute au guidon de la Rapide.

Lorsque le journaliste revient vers Clément Garreau, le concessionnaire qui a mis à disposition la moto pour l’essai (le même que celui qui a créé l’ébauche du cadre Featherbed dont on parle ici), le journaliste lui rétorque :

« Je regrette que le moteur ne monte pas jusqu’à 200, car j’aurais eu plaisir à rouler à cette allure avec une pareille tenue de route ! »

Il concluera son essai en indiquant que la tenue de route et le confort, grâce la selle spéciale en caoutchouc / mousse combinée à la suspension arrière « sont stupéfiants ». Et que la souplesse ainsi que la maniabilité, quant à elles, sont irréprochables. Quant à la vitesse, elle pourrait facilement monter à 180 km/h et plus encore en échappement libre après un rodage complet.

Rares étaient les motos à cette époque capables de proposer ce type d’expérience sur la route.

1947 / 1948, évolution de la Rapide série B

Entre 1947 et 1948, Vincent H.R.D. fera évoluer sa Rapide série B en apportant quelques modifications notoires même si la base en elle-même reste identique.

Si la Rapide brille en grande partie grâce à son moteur colossal, la partie cycle propre aux Vincent H.R.D. est son pendant. Loger un si gros moteur dans une partie cycle qui ne se déforme pas sous l’effet du couple et de la puissance du moteur demandait de trouver des solutions ingénieuses et novatrices en la matière. Même si Norton avec son Featherbed avait révolutionné le monde de la compétition avec son cadre double berceau, Philip Vincent voyait les choses d’un autre oeil. 

Si on examine en détail le moteur de cette dernière version de la Rapide série B, on remarque que le bicylindre conserve sa disposition en V en formant un angle de 50 degrés. Afin d’améliorer le refroidissement du cylindre arrière, celui-ci est déporté de 32 mm par rapport à son jumeau avant. Le rapport alésage x course reste le même – 84 x 90 mm – cubant toujours 998 cm3 pour une puissance d’environ 45 CV. Les fûts des cylindres pénètrent dans le carter qui est réalisé dans un alliage d’aluminium issu de l’aviation, le D.T. D4 C4. Les cylindres, habillés de larges ailettes pour augmenter la surface de refroidissement, sont réalisés en alliage léger et reçoivent une chemise en fonte spécifique. Les culasses coiffant les cylindres sont réalisées dans un alliage traité – le RRS 3 B – et reçoivent des sièges rapportés, en fonte austénitique pour l’admission et en bronze d’aluminium pour l’échappement. 

Si on s’intéresse aux soupapes d’échappement, usinées en acier DTD dans un diamètre de 42,5 mm, on remarque que celles-ci sont disposées à l’avant et sur les 2 cylindres afin d’être mieux refroidies. Les soupapes d’admission, quant à elles, sont fabriquées en acier Silichrome dans un diamètre de 46 mm. Leurs tiges sont maintenues par des guides doubles et sont rappelées par 2 ressorts concentriques. Les culbuteurs, eux, sont usinés en acier forgé KE 805 et leurs surfaces de contact sont cémentées. Le réglage de ces derniers a d’ailleurs été pensé de manière à ce qu’ils soient facilement accessibles malgré leurs protections. Les tiges de culbuteurs de 152 mm sont fabriquées avec un acier spécifique traitée contre la rouille. 

Les pistons installés dans les 2 cylindres sont chacun équipés de 2 segments d’étanchéité et d’un segment racleur, leurs axes flottants et creux étant maintenus latéralement par des joncs. Les bielles, installées côte-à-côte, sont forgées en acier et sont capables de résister à 65 tonnes. Leurs têtes, quant à elles, reçoivent des bagues en acier EN 31, cémentées, rectifiées et glacées. Les roulements sont composés de 6 rangées de rouleaux de 3 mm de diamètre et de 5 mm de long. Les volants sont en acier forgé, complètement usinés et leurs axes sont supportés par 4 gros roulements.

Le graissage du moteur est de type carter sec, assuré depuis un réservoir de 3,4 litres intégré au cadre alimentant une pompe à piston entrainée par une vis sans fin à travers un filtre situé entre la pompe et le réservoir. Un second filtre avec un élément en coton – TECALEMIT – est disposé entre la pompe et le moteur. Via son réseau de canalisations internes, l’huile est envoyée vers les têtes de bielle, les roulements de distribution et l’arrière des cylindres. L’huile raclée sur les volants, quant à elle, retourne en grande partie au réservoir tandis que l’autre partie arrose la culbuterie via des dérivations disposée sur la canalisation de retour.

La transmission primaire conserve son principe initial via une chaîne triple lubrifiée dans un bain d’huile et sa tension est toujours régulée grâce à un tendeur automatique.

L’éclaté et la coupe du moteur.

L’embrayage, quant à lui, est composé d’un disque servant à assurer la pression des segments sur le tambour en fonte, lui même muni d’ailettes afin d’accroître sa capacité de refroidissement. Cet embrayage a la particularité d’être relativement doux et de transmettre sans glissement la puissance du moteur. La boîte de vitesses, quant à elle, est composée de 4 rapports avec un levier permettant de trouver sans difficulté le point mort et même de changer les vitesses à la main. Bien évidemment Vincent H.R.D. propose, en option, des couronnes arrières de différentes dimensions afin d’adapter les rapports à l’utilisation du client. Aussi, une seconde couronne peut être montée indépendamment de l’autre côté de la roue arrière afin de bénéficier de 2 démultiplications finales différentes. Cette prouesse est rendue possible grâce au système de double tambours de frein qui permet de démonter et remonter la roue arrière dans l’autre sens.

Du côté de la carburation, on retrouve un carburateur Amal de 27 mm alimentant chaque cylindre dont la commande est couplée et synchronisée. Les commandes d’air restent distinctes et ces carburateurs peuvent accueillir sans problème des filtres à air de la même marque en y ajoutant bien évidemment une petite rallonge financière.  

Le défi de Philip Vincent était de réussir à caser un si gros moteur dans une partie cycle ayant l’empattement et le poids d’un monocylindre de 500 cm3 tout en conservant un confort de route « royal » et sans se désunir à la moindre accélération. Pour ce faire, comme sur le millésime précédent, le moteur a été incorporé directement au cadre par des colonnettes et des consoles. Suspendu à une grosse poutre constituant le tube supérieur, l’imposant carter du bloc moteur sert de base à l’ensemble et vient s’articuler à la fourche arrière oscillante. Visuellement, la suppression du tube de selle et du tube avant renforce cet effet « compressé » et l’ensemble forme un bloc compact et rigide capable de résister aux tensions les plus fortes.

L’épine dorsale de la Rapide avec la poutre centrale intégrée dans le réservoir.

Si la suspension arrière, de type Cantilever, dispose d’un débattement de 140 mm et comporte des amortisseurs réglables à friction, la fourche avant quant à elle, de type parallélogramme avec ses roulements d’axes en bronze garantit une rigidité latérale exemplaire. Pour l’utilisation d’un side-car, des biellettes supérieures plus courtes en complément d’un ressort plus puissant peuvent être montés en remplacement des éléments d’origine. Toujours disponible en option et spécifiquement destiné à cet usage, le kick peut être monté à gauche si nécessaire.

Les roues, tournant sur des galets coniques, sont équipées de broches et sont instantanément amovibles. A l’arrière, le pneu équipant la jante est un Avon 20 x 3,50 à pavés tandis qu’à l’avant, il s’agit d’un Avon 21 x 3,00 à stries. Comme sur le millésime précédent, pour le freinage, chaque roue possède ses deux tambours couplés, d’un diamètre de 178 mm et de 22 mm de largeur pour chacun. Tous deux rendant alors le freinage extrêmement puissant et parfaitement équilibré. Aussi, les garde-boues sont toujours fabriqués en alliage léger pour un gain de poids maximum et le principe des 3 béquilles (1 à l’arrière et 2 latérales) est conservé.

Au niveau des équipements électriques, cette série B embarque avec elle : un phare de 200 mm, un feu stop, ainsi qu’un avertisseur Lucas Altette. La magnéto est une Lucas et se trouve être entraînée par engrenages. Quant à la dynamo, équipée d’un régulateur, entraînée par chaîne et couplée à une batterie Exida de 13 A/h, celle-ci est capable de délivrer 50 Watt sur une tension de 6 Volt.

Le réservoir possède une contenance de 17 litres et les tuyaux souples qui permettent de desservir le couple de carburateurs ont un alésage intérieur de 7 mm. Avec une consommation variant entre 5 et 6 litres aux 100 kms, cette capacité de réservoir confère à la Rapide une belle autonomie permettant aux motards d’envisager de longues étapes sereinement tout en confort grâce à ses repose-pied réglables, son étroit guidon droit et sa confortable selle double Feridax Dunlopillo Dualseat. Le silencieux Carbjector équipant la Rapide, installé en terminaison de l’unique tubulure d’échappement de 41,3 mm de diamètre, se révèle être un autre atout pour les longues étapes car il apporte un réel confort routier en distillant un vrombissement d’une relative discrétion témoignant de son efficacité.

Avec un poids culminant autour des 206 kg et une puissance de 45 CV, le rapport poids / puissance de 4,5 kg/CV se révèle particulièrement bon pour l’époque, mais Philip Vincent ne comptait pas s’arrêter là avec sa Rapide. Pour sa marque, il lui fallait une version encore plus « sportive » de cette moto.

C’est ainsi qu’arrivera alors la fameuse Black Shadow.

Histoire à suivre.

Ecrit par BrG.